Ukraine: Washington propose un gel du front, les questions territoriales en suspens
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a annoncé avoir obtenu des Etats-Unis une révision de leur plan pour terminer la guerre avec la Russie, qui prévoit désormais un gel du front tout en laissant de côté les questions territoriales et deux exigences clés de Moscou.
La version initiale de ce texte avait été présentée par Washington il y a près d'un mois et perçue à Kiev comme faisant la part belle aux demandes du Kremlin.
Après d'âpres négociations entre Ukrainiens et Américains, le plan n'impose plus un retrait ukrainien du Donbass ni un engagement juridique de l'Ukraine qu'elle n'intégrera pas l'Otan, deux demandes importantes de Moscou dont l'accord est loin d'être acquis.
M. Zelensky a présenté aux journalistes, dont ceux de l'AFP, cette nouvelle mouture en 20 points destiné à mettre fin au pire conflit sur le sol européen depuis la Deuxième guerre mondiale.
Ce texte doit désormais être étudié par la Russie. Interrogé à ce sujet mercredi, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a indiqué que Moscou était en train de "formuler sa position" et refusé d'en commenter les détails.
Selon le président ukrainien, le texte ne prévoit plus aucun retrait immédiat des troupes ukrainiennes des quelque 20% du territoire encore sous leur contrôle dans la région orientale de Donetsk, objectif prioritaire de l'armée russe.
"Nous sommes dans une situation où les Russes veulent que nous nous retirions de la région de Donetsk, tandis que les Américains tentent de trouver une solution", a déclaré M. Zelensky.
Le nouveau document propose ainsi un gel du front aux lignes actuelles et que soient ouvertes des discussions sur la création de possibles zones démilitarisées, qualifiées de "zones économiques spéciales" par les négociateurs américains.
- Aucune obligation sur l'Otan -
"Nous ne sommes pas parvenus à un consensus avec la partie américaine sur le territoire de Donetsk", a poursuivi M. Zelensky, plaidant pour une "rencontre au niveau des dirigeants afin d'aborder les questions sensibles" avec les Etats-Unis.
Pas de consensus non plus sur la centrale nucléaire de Zaporijjia, la plus grande d'Europe, occupée par la Russie depuis 2022 et située dans le sud de l'Ukraine.
Selon M. Zelensky, les Etats-Unis proposent une gestion conjointe entre Moscou, Kiev et Washington, ce qu'il considère "très inapproprié et pas tout à fait réaliste".
Autre demande capitale de Moscou retirée de l'accord: l'Ukraine n'est plus tenue d'abandonner formellement sa volonté d'adhérer à l'Otan, ce qui a été présenté par le Kremlin comme l'une des causes du conflit.
"C'est à l'Otan de décider si elle souhaite ou non accueillir l'Ukraine parmi ses membres. Et notre choix est fait. Nous avons renoncé à modifier la Constitution ukrainienne pour y inscrire que le pays ne rejoindra pas l'Otan", a annoncé Volodymyr Zelensky.
La version originale du plan rédigée par les Etats-Unis exigeait de Kiev un engagement juridique à ne pas rejoindre l'Alliance, dont l'expansion est considérée comme une menace existentielle par Moscou.
L'éventualité d'une adhésion de l'Ukraine à l'Otan est cependant mince car plusieurs pays membres, dont les Etats-Unis, s'y opposent.
- Élections et référendum -
Le président ukrainien, dont le mandat a expiré en mai 2024, a aussi assuré que le document prévoit qu'il organise une élection présidentielle "dès que possible" après la signature d'un accord mettant fin aux hostilités.
Il a en revanche indiqué que tout accord prévoyant un retrait des troupes ukrainiennes devait être approuvé par référendum par les Ukrainiens, ce qui nécessiterait un cessez-le-feu de 60 jours.
La Russie a jusqu'à présent rejeté toute demande de cessez-le-feu sans accord de règlement du conflit à long terme, estimant qu'une pause dans les combats permettrait à l'Ukraine de se réarmer.
Moscou n'a pas réagi pour le moment aux détails du plan américain mais un responsable russe avait qualifié cette semaine les progrès dans les négociations de "lents" et critiqué la position des alliés européens de Kiev, accusés de chercher à "faire dérailler le processus diplomatique" en poussant à des modifications inacceptables pour la Russie.
Des pourparlers directs entre Russes et Ukrainiens cette année à Istanbul n'avaient abouti à aucun résultat concret hormis des accords d'échange de prisonniers et de dépouilles de soldats tués.
Sur le terrain, l'armée russe a accéléré ses avancées ces derniers mois. Les forces ukrainiennes ont annoncé mardi avoir dû se retirer de la ville de Siversk, l'un des derniers verrous qui empêchait les forces russes de se rapprocher de Sloviansk et Kramatorsk, dernières grandes villes du Donbass sous contrôle ukrainien.
De nouvelles frappes russes ont visé mardi le réseau électrique ukrainien, provoquant des coupures de courant, et la région portuaire d'Odessa, ciblée à de multiples reprises ces dernières semaines.
F.Lono--HStB