

Angleterre: des transferts record entre hégémonie, survie et livres de compte
Les clubs de Premier League ont dépensé cet été comme jamais, dopés par les droits TV et, pour moitié, par l'argent des compétitions européennes, une réalité qui embrasse des enjeux variés de survie, de suprématie... ou d'écriture comptable.
Au total, l'élite anglaise a acheté pour plus de 3,4 milliards d'euros, selon les chiffres publiés mardi par le cabinet Deloitte, une somme vertigineuse qui pulvérise l'ancien record et surpasse les dépenses additionnées des championnats de France, d'Italie, d'Espagne et d'Allemagne.
La ligue la plus suivie au monde profite des lucratifs contrats de diffusion (domestiques et étrangers), un avantage considérable sur la concurrence continentale et qui bénéficie à tous, promus inclus.
Cette puissance financière s'est accrue avec l'élargissement des compétitions européennes qui a permis à la Premier League d'y placer cette année, et pour la première fois, neuf de ses vingt clubs (six en Ligue des champions, deux en Ligue Europa, un en Ligue Conférence).
- Ruissellement... -
Un club comme Tottenham, 17e la saison dernière mais qualifié en C1 grâce à son triomphe en Ligue Europa, peut attirer des hauts salaires en prêt (Kolo Muani, Palhinha) ou recruter des talents comme Xavi Simmons et Mohammed Kudus.
Les 63 millions d'euros correspondant à l'ailier ghanéen ont par exemple permis à West Ham, le club vendeur, d'en réinvestir 46 sur un milieu portugais de 21 ans venu de Southampton (D2), Mateus Fernandes.
L'une des spécificités de l'été 2025 tient d'ailleurs dans ces transactions entre clubs anglais, plus nombreuses et exceptionnelles par leur ampleur.
Cela s'explique en partie par une astuce comptable: le club vendeur enregistre les bénéfices immédiatement, alors que le club acheteur étale les frais sur la durée du contrat de sa recrue.
Ce système respecte les règles de viabilité financière imposées en Angleterre (les "Profitability and Sustainability Rules", ou PSR) sans brider l'investissement, bien au contraire.
- ... et course à l'armement -
Un durcissement à venir de cette réglementation a peut-être conduit certains clubs à une course à l'armement, affirment des observateurs.
"J'ai l'impression que Liverpool profite de la situation actuelle pour faire le plein de talents de façon à devenir virtuellement injouable", a avancé Christian Purslow, ancien dirigeant d'Aston Villa, sur Sky Sports.
La holding américaine Fenway Sports Group qui possède Liverpool a rompu cet été avec son habituelle politique d'équilibre: les dépenses nettes (en retranchant les ventes) avoisinent 250 millions d'euros après l'arrivée d'Alexander Isak lundi contre 144M EUR (record anglais).
Les autres cadors ont également mis le paquet, de Manchester City à Chelsea en passant par Arsenal qui a multiplié les achats (Zubimendi, Madueke, Eze, Gyökeres...) sans aucune entrée d'argent pour compenser, ou presque.
Cette fièvre acheteuse s'est étendue jusqu'aux promus Burnley, Leeds et Sunderland qui ont chacun sorti, sans exception, plus de 100 millions de livres pour adapter leurs effectifs à l'exigeante Premier League.
Ils espèrent ainsi écarter la malédiction qui frappe depuis deux saisons les nouveaux venus, tous redescendus en Championship (D2) après une seule saison dans l'élite.
Sunderland notamment s'est payé le luxe d'enrôler Granit Xhaka, ancien capitaine d'Arsenal et du Bayer Leverkusen, ainsi que le talentueux milieu sénégalais Habib Diarra, recruté contre 30 millions de livres (record du club) en provenance de Strasbourg.
Le pari des Black Cats a payé d'entrée avec deux victoires empochées durant les trois premières journées du championnat. Six points en poche, c'est déjà la moitié du total amassé par Southampton, la lanterne rouge, en 38 matches la saison dernière.
V.Leilani--HStB